Dessins 2007 – 2009
Galerie du jour – Agnès B.
17 octobre au 10 novembre 2009
Commisaire : André Magnin
avec l’aide précieuse de Louis Ucciani
& Don Van Diet
Mille dessins sauvages d’une autre naissance, dont la « maladresse » semble plus instruite que naïve, sont arrivés, redevables à rien sinon peut-être l’espoir de sortir de la réclusion individuelle à perpétuité promise au « dernier des immobiles ». Jour après jour, de son espace irrémédiablement réduit à quelques mètres carrés, ses images du monde, idéographes, cosmétologie, neigéographes s’étalent comme des irruptions, des explosions intergalactiques, des émergences miraculeuses de l’univers d’avant l’art. « J’ai toujours considéré la poésie et l’art comme une violence. Je me sens plus proche d’un primitif mauritanien que d’un artiste américain. J’utilise les matériaux et les couleurs à la sauvage. C’est comme s’ils me disaient merci. Quant j’ai repris mes carnets d’école, je les ai extirpé de l’univers de l’école. Je les ai rendu à un total poétique. Sans référence. Ils n’apprennent plus rien. Tu les regardes comme une forme pure délivrée de son contenu didactique. Je les ai purifiés. » Je sais désormais que lorsqu’un poème parait sur le dessin, il est l’invité du dessin, pas le contraire. Les titres sont comme un dessin supplémentaire, comme un vers de poème abandonné là. Un vers solitaire destiné au dessin. Certains dessins sont solitaires, ils ont une sorte de mélancolie intrinsèque comme des dessins immémoriaux composés de mains inexpérimentées. La maladresse est à la fois plus exacte que les expériences les plus instruites car elle porte une sauvagerie, une innocence. On ne sait rien quand on commence, tu n’as pas cette pratique lointaine qui exerce son talent.
André Magnin (propos recueillis)
Sang et or, encres de perles anglaises, ombre à paupières, mascara, salive, mercurochrome, bleu de méthylène, crayons et poudre de mine de crayons, lipstick à paillettes, fluid make-up, blush, acryliques magenta crépusculaire et galactic blue, vernis à ongle de Karachi… la cosméticologie de Matthieu Messagier nous en fait voir de toutes les couleurs. Elle ramène à soi deux aires sémantiques issues d’une racine commune : en grec antique, la kosmétikè, art de la parure dérive du Kosmos ; Nature et artifice. Elémentaire et superfluité. Une déclaration de connivence qui a pour effet premier de faire gicler les couleurs comme d’une banderille sur l’encolure d’un taureau de combat. Certaines couleurs sont à pied d’œuvre, mais d’autres sont à table, en veine de gaieté pour avoir atteint le stade des liqueurs d’après café ; d’autres en chemin affleurent avec des grâces, des timidités, des joliesses. Il y a les opulentes, les véhémentes aux rênes lâchées, les spectrales qui montent du silence en attelages fantômes, les voluptueuses qui s’irisent, se vaporisent, se condensent, se fibrillent, se radicellent… des qualités qu’on supposait immuables tombent d’elles-mêmes. Des répulsions se retournent en séductions. Un blanc du seau de la traite qui vient de tourner se met à jacter comme une chèvre sur un marron de cabane de trappeur. Un vert de poireau neurasthénique passé à tabac par un jaune trouve la force d’un retour étrange en douceur. Voilà, pour le soin tenseur des yeux superlift non-stop régénérant de la gamme Messagier. »
Malek Abbou : Desperado galactique (extraits) in Anima Chromatica.